2 Chronique du Corona Virus : Métaphores

Comme on en parle....

Parlant de l'épidémie, on y va à grand renfort de métaphores. Pour mémoire ou pour apprendre, la métaphore est une figure de style qui consiste à donner à un mot un sens qu'on attribue généralement à un autre en jouant sur l'analogie, les ressemblances. La lune pour Victor Hugo est « une faucille dans un champ d'étoiles ». Ou bien on peut être « dévoré par le remords », dévoré ici est à prendre au sens figuré et non au sens propre. Bien sûr. Guy de Maupassant compare la Tour Eiffel à une bergère qui veille sur son troupeau, entendons le troupeau des voitures. En bref, la métaphore est une image.

Pour revenir à l'épidémie, c'est la métaphore de la tempête qui revient le plus souvent. En effet, il semblerait que ces jours-ci, la « pression » retombe un peu. Mais on s'interroge, n'est-ce pas une « accalmie passagère » et ne faut-il pas s'attendre à un nouveau « déferlement » de malades ? Et à d'autres « vagues » ? Rien n'est moins sûr. En Île-de-France, un département en particulier, la Seine-Saint-Denis, paraît encore pris dans la « tourmente » et on « surfe sur la vague » à Bobigny.... Jusqu'à ce qu'on « touche le fond » parce que dans certains services on est proche de la « noyade ».

Après celle de la tempête et des navigations à vue, reviens épisodiquement l'analogie avec le feu, l'enfer et les foyers de l'épidémie. Dans certains secteurs, on vit en effet « l'enfer » avec un virus qui comme le feu « dévore ». Son appétit est insatiable. Il fait rage dans quelques foyers particulièrement touchés. Comme à Mulhouse ou à Metz.

Mais la métaphore la plus employée promue par le président de la République est celle de la guerre, de la guerre contre un ennemi invisible. La mobilisation nationale est déclarée avec le rappel des réservistes, jeunes internes, retraités pour aller au front. Souvent sans armes... Il n'empêche la Nation Unie est entrain de produire ses héros. Gageons que les soignants décédés auront leur stèle comme il convient après toute bataille. Dans sa dernière intervention, le président distingue la première, la deuxième et la troisième ligne. Comme en 14, on est au front, au ravitaillement ou à l'arrière. Là où peuvent se trouver les « planqués ».

Peu employée est celle du Mal qui ronge comme le nénuphar de Boris Vian dans l'Ecume des Jours. Ce nénuphar, qui commence à grandir dans le poumon de Chloé et qui résiste aux traitements les plus coûteux. Le nénuphar/Covid qui ronge les poumons des contaminés et les conduit à la mort. Peu sollicitée dans le discours, la Faucheuse comme métaphore est peu utilisée.. C'est qu'on n'est peu d'humeur à rigoler avec la Camarde et à mettre, comme Brassens, « des fleurs dans les trous de son nez ».

De la même manière on utilise peu l'allégorie, cette autre figure de style pour parler de quelque chose autrement. Elle est très utilisée en littérature où elle consiste à exprimer une idée en utilisant une histoire comme le fait Albert Camus dans la Peste. On y fait allusion aujourd'hui mais on est prudent. On ne va pas jusqu'à faire avec cette histoire d'épidémie un parallèle avec un état de société qui serait la nôtre. Camus lui le fait implicitement ou explicitement. La Peste est une allégorie de la guerre et fait clairement référence à l'horreur des camps nazis avec ces enterrements à la chaîne, ces fosses communes, ces cadavres transportés au crématoire à l'aide de tramways détournés... Dans le roman, l'univers concentrationnaire est très présent. Le texte interroge les réactions humaines face à l'épidémie, rappelant que les épidémies, comme les guerres, réveillent les instincts les plus primitifs de l'être humain. Dans ce roman, d'une part on veut survivre, on s'acharne à combattre l'épidémie et sauver les malades, d'autre part on s'enfuit... à la campagne, voire on tente de tirer profit de la pagaille provoquée par la maladie.

Difficile alors de faire ce type d'analogie avec ce que nous vivons aujourd'hui même avec tous ces confinement, laissez-passer dérogatoire, couvre-feux, amende, traçage ou pistage de la population, enterrements en cati-mini, etc. Bon j'arrête, je vais encore faire dans la dystopie extrémiste et pessimiste. Ainsi va le monde.

Didier Martz, philosophe Ainsi va le monde 406 Chroniques philosophiques de la vie ordinaire

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