Café de philosophie : Mai 68/ Mai 2018, le retour ?

Cours, camarade, le vieux monde est toujours derrière toi !Quelles leçons souhaitons-nous tirer de cette « révolution » ? En célébrant mai-68, que célébrons-nous ? – Séance du 19 mai 2018 au Bar « Les 3 p’tits bouchons » à Reims

Double question pour situer l’enjeu lors de cette séance de commémoration des évènements de mai 1968 : - ces « évènements » font-ils continuité ou sont-ils en rupture dans le cours de l’histoire ? - si nous prenons ces évèments comme révélateurs de ce qui va se produire dans notre société, que vaut ce modèle prédictif pour notre époque ? 1 – Il apparaît d’abord que ces lointains évènements sont restés comme une coupure dans le cours de la vie, sorte de parenthèse qui s’ouvre de façon inopinée, et qui se referme, lentement certes mais inexorablement, au point de se demander aujourd’hui si les acquis de l’époque ne sont pas repartis avec elle. Que reste-t-il de mai-68 ? 2 – Les détails qui sont restés dans toutes les mémoires sont les suivants : - Caractère global des mobilisations - Fusion sociologique lors des débats qui permettent à toutes les couches sociales de se rencontrer. - Mais dans le même temps : valorisation de l’individu dont les désirs sont déclarés souverains (« Jouissez sans entraves ».) 3 – Les grands changements qui ont été initiés à l’issue de ces évènements ont été discutés : - Si la 4ème semaine de congés payés a bien été pérennisée, les hausses de salaires sans équivalent ont été rapidement « reprises » par l’inflation. - Par ailleurs, si les avancées essentielles pour les droits des femmes ont été plus tardives (lors de l’apparition du MLF), mai-68 a néanmoins « allumé la mèche »  Et aujourd’hui, si ces acquis nous paraissent avoir été bien réels, l’histoire de cette période peut-elle valoir de modèle pour la nôtre ? 4 – On signale que l’histoire ne se répète pas qu’elle ne « repasse pas les plats », et qu’il serait donc inutile de le croire. On énumère de surcroit des différences : - Existence aujourd’hui de l’Europe qui fait que les revendications faites en France subissent en contrecoup une réaction venue de Bruxelles – alors qu’en 68 il ne s’agissait que d’une union douanière. - Disparition du pôle collectif, y compris dans les luttes sociales (absence de convergence des luttes) - Modification des idéaux permettant d’orienter ces luttes : 1) sauver la planète des destructions dues à l’exploitation humaine (diversité biologique, réchauffement climatique) ; 2) accueillir avec humanité les migrants ; 3) harmoniser mondialisation et patrimoine culturel ; 4) luter contre les inégalités sociales. Il est vrai que certains de ces idéaux étaient déjà présents en 1968 (en particulier le dernier) ; mais ils étaient analysés dans le cadre du marxisme et non dans celui du libéralisme économique. On peut d’ailleurs souligner que, si en mai-68 l’alternative était entre capitalisme et communisme, notre époque a ceci de particulier qu’elle semble bien ignorer une alternative quelconque au libéralisme économique.

- On relève pour conclure que nous devons aux révolté.e.s de mai-68 l’appel à la liberté de choisir son destin et la volonté de ne pas se soumettre sans discussions à des obligations – qu’elles viennent de l’Eglise, des Casernes ou de l’Elysée. On ajoute qu’en 1968 ces luttes s’étaient déjà répandues de pays en pays (étudiants de Californie, de Berlin ou de Paris) et qu’elle ont peut être aussi infiltré les mouvements contemporains : Printemps arabes, mouvement ♯metoo. Par ailleurs le rôle des réseaux sociaux pour relayer ces luttes est devenu trop évident pour qu’il soit détaillé. On se sépare à 19 heures ne se donnant rendez-vous le 16 juin. Compte-rendu J-P Hamel La contraception , une libération de la femme ? Ou comment un train peut en cacher un autre.

Qu'est-ce que penser ? C'est entre autre imaginer qu'une libération peut aussi signifier, « en même temps », un assujettissement comme l'écrivait Michel Foucault. Par conséquent de tenter de trouver dans l'une ou l'autre de ces libérations effectives – il ne s'agit pas de les dévaloriser – ce qui pourrait bien en faire aussi une nouvelle contrainte. Au risque bien sûr d'aller contre le courant toujours très fort de l'idée reçue qui étant reçue, se fixe et s'arrête, se fige et se revendique au nom du bien. Difficile alors d'aller contre. Non, pas aller contre mais penser sa contradiction qui est comme sa compagne, sa complice, qui lui donne son existence.

Exercice 1 : La contraception, un acquis de Mai 68. Une libération de la femme et en même temps une nouvelle contrainte et une nouvelle domination, celle de l'homme. La charge mentale qu'elle – la contraception - représente, la femme doit penser à la pullule, l'acheter, la prendre. Elle doit en subir aussi les effets négatifs – certaines préfèrent y renoncer et en passer par d'autres moyens mais c'est encore à elle d'y songer. L'idéologie des scientifiques masculins et machistes les a conduit à penser d'abord à la femme pour ce qui en est de la contraception et pas à une contraception pour les hommes. Imaginez qu'un homme puisse prendre une pilule pour empêcher ses spermatozoïdes virils d'atteindre le but ! Lèse-majesté.

Exercice 2 : on cherchera maintenant dans toutes les inventions et les produits et objets qui vont avec, toutes ces dispositions qui libèrent assujettissent. Le lave-linge, la télévision, la cafetière électrique...

Exercice 3 : on s'entraînera à rechercher le naufrage potentiel dans l'invention du bateau (Lao-Tseu)

Didier Martz +



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